L’arnaque à la liste rouge

Il fut une époque pas si lointaine où il fallait payer pour ne pas figurer dans l’annuaire. La situation devenait de plus en plus absurde et intenable. En effet, les télédémarcheurs bénéficaient de tarifs avantageux de la part de France Télécom puis des autres opérateurs. Avec l’informatisation croissante et l’interconnexion des fichiers, c’était la tranquillité des abonnés qui était en jeu. Aujourd’hui encore, en 2013, j’entends encore des retraités continue se plaindre des marchands de fenêtre comme je me suis plaint des cuisines Spacial qui faisait du démarchage automatisé au milieu des années 90.

Le droit à la tranquillité était payant et cher en plus : 28 euros par an.

Quand on lit que France Télécom s’opposait à la fin de cet arnaque, c’est moralement indéfendable.


France Télécom s’oppose à la liste rouge gratuite

Le 4 mai dernier, Christian Pierret, secrétaire d’État à l’Industrie, a soumis à consultation un projet de décret pour la création d’un annuaire téléphonique universel, rassemblant toutes les coordonnées fixes et mobiles des abonnés français. Depuis le début de la semaine, France Télécom monte au créneau et refuse déjà une proposition de gratuité concernant la "liste rouge", un service qui permet à l’abonné de rester anonyme dans tout annuaire — vis à vis d’autres abonnés ou de sociétés commerciales. Un service que l’opérateur historique facture actuellement 15,13 F TTC par mois.

« La suspension [de l’inscription sur la liste rouge] ainsi que les restrictions au droit de figurer sur des annuaires peuvent être demandées à tout moment gratuitement à l’opérateur ou à son distributeur », peut-on lire dans le projet de décret de Pierret (document Word Windows). Un calendrier est même fixé : l’opérateur historique devra d’abord baisser ses tarifs et se préparer à la gratuité du service pour le 31 décembre 2002.

France Télécom s’y oppose. « Il n’est absolument pas question d’envisager la gratuité de la liste rouge », explique une porte-parole de l’opérateur. « C’est une question de revenus, la liste rouge représente pour nous 840 millions de francs par an. » Des revenus qui entrent bien dans les caisses de France Télécom SA, et non dans celles de sa filiale Wanadoo, qui exploite pourtant l’activité Pages Jaunes (annuaire professionnel), sur imprimé et support électronique.

La fin de la poule aux oeufs d’or ?

Bref, l’opérateur ne veut pas tuer la poule aux oeufs d’or. Pire, l’attachée de presse reconnaît que les frais de gestion de cette liste rouge « sont assez faibles », pour ne pas dire négligeables. Ces 840 millions obtenus sont donc presque autant de profits...

France Télécom préfère consentir des efforts sur sa "liste chamois", un service lancé en 1998, facturé 11,96 F TTC par mois et offrant juste une non-parution des informations relatives à l’abonné dans les annuaires imprimés et électroniques. Seule la "liste orange" est gratuite, elle permet d’être invisible aux sociétés de marketing direct. Alors que la liste rouge réunit ces deux services, et y ajoute l’anonymat au niveau des renseignements téléphoniques (le 12).

« Il y une confusion entre ces deux services [rouge et chamois, Ndlr] dans les propositions de Christian Pierret », explique la porte-parole de France Télécom, « la liste chamois pourra baisser de prix et même devenir gratuite ».

France Télécom va donc tenter de placer sa liste chamois dans le cadre du décret et en écarter sa liste rouge. Les concertations s’annoncent très animées. Elles prendront fin le 31 mai 2001.

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