Faire moins d’enfants pour sauver la planète : itinéraire d’une thèse vivace et qui est justifiée

En 2006, en commentant son dernier ouvrage "le privilège de jonquilles", Pascal Sevran s’était pris une volée de bois vert. Il avait eu l’audace de critiquer l’explosion démographique africaine qui menait à une mortalité infantile désastreuse. Selon lui, les hommes se préoccupaient plus du plaisir immédiat à copuler qu’à l’avenir forcément parsemés d’inutiles souffrances de leurs descendances.

La proposition la plus délirante reste sans doute de proposer à que chacun d’entre nous de vivre désormais comme un bengali, c’est-à-dire précarité et pauvreté extrême, histoire de serrer encore un peu plus sur le vaisseau « Terre » à la manière du RER-A aux heures de pointe. Ben voyons …

N’oubliez pas que le système de retraite français se finance par le travail direct des jeunes et qu’il faut beaucoup de jeunes pour l’équilibrer. Véritable fuite en avant qui nécessite une croissance continue de la population, cela n’est pas sans rappeler la chaîne de Ponzi. Pour rappel, dans la chaîne de Ponzi ce sont les derniers arrivants qui se font BZ euh … rouler …


Faire moins d’enfants pour sauver la planète : itinéraire d’une thèse vivace

Par Journaliste Figaro Edouard de Mareschal Mis à jour le 09/10/2018 à 20:03 Publié le 09/10/2018 à 19:59

L’idée selon laquelle la croissance démographique représenterait une menace écologique imminente obtient un regain d’attention, depuis la publication d’une étude qui préconise de faire moins d’enfants pour réduire son empreinte carbone.

Faut-il faire moins d’enfants pour sauver la planète ? L’idée refait surface depuis la publication en juillet 2017 d’une étude dans la très sérieuse revue anglo-saxonne Environmental Research Letters. Celle-ci liste plusieurs actes concrets pour lutter contre le réchauffement climatique.

Parmi les actes les plus banals, on trouve le fait de changer ses ampoules, abandonner son sèche-linge, recycler, faire sa lessive à l’eau froide ou encore opter pour une voiture hybride. Viennent ensuite les cinq options les plus efficaces selon l’étude : adopter un régime végétarien, se fournir en électricité verte, éviter les vols transatlantiques, abandonner la voiture et... avoir un enfant en moins.

Reprise dans les médias français, l’étude provoque régulièrement une polémique. La dernière date de lundi, lorsqu’elle a été citée dans une infographie de l’AFP qui accompagnait la sortie du dernier rapport des experts du Giec. Devant les protestations, l’agence a dû se défendre de « faire la promotion du malthusianisme ».

Dès sa publication par les chercheurs Seth Wynes et Kimberly A Nicholas, l’étude a provoqué un large débat dans la communauté scientifique. Certains détracteurs ont critiqué la méthode utilisée : ils ont relevé un décompte multiple des émissions carbone. Sur un vol transatlantique par exemple, on ne peut pas imputer les émissions sur l’individu qui le prend, et aussi sur ses parents qui ont décidé de le mettre au monde. Mais surtout, cette thèse exclut tout scénario dans lequel la trajectoire des émissions globales deviendrait neutre ou négative. Surconsommation

D’autres relèvent que l’étude se focalise sur la sphère privée, alors que les comportements individuels peuvent avoir un impact beaucoup plus important dans la sphère professionnelle ou dans les actions collectives. Ils estiment aussi que l’étude sous-évalue le rôle de la surconsommation dans la dégradation de l’environnement. Enfin, ils jugent que la liberté de fonder une famille est une droit fondamental.

Ce n’est pas la première fois que la démographie siège sur le banc des accusés. Dans une tribune publiée mardi dans Le Monde , des scientifiques appelaient à « freiner la croissance de la population », estimant que démographie et environnement étaient des sujets « indissociablement liés ». Déjà en 1992, le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) estimait que la Terre était « au bord du gouffre », et que la baisse de la croissance démographique était le principal levier pour lutter contre les émissions de carbone.

En France, la thèse a aussi trouvé de l’écho chez des personnalités politiques comme l’écologiste Yves Cochet. Dans un colloque sur la décroissance, l’ex-député Vert s’était prononcé pour la « grève du troisième ventre », c’est-à-dire pour une dégressivité des aides sociales à partir du troisième enfant. « Ces thèses ne pèsent plus rien dans l’écologie politique », assurait mardi le député européen Yannick Jadot. « Yves Cochet était influencé par les grandes théories de l’effondrement global qui ne tiennent pas la route. »

« On ne peut pas dire aux gens de ne pas avoir d’enfants comme on leur interdirait de circuler sur les voies sur berges. »

François Gemenne, spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement à Sciences-Po

Y a-t-il donc un lien entre la démographie et les émissions de gaz à effet de serre ? « Sans aucun doute », répond le professeur François Gemenne, spécialiste des questions de géopolitique de l’environnement à Sciences-Po. « Mais la polémique vient de la façon dont les scientifiques présentent la natalité », poursuit-il. « Elle est vue comme une variable d’ajustements technique parmi d’autres, alors qu’elle dépend de considérations qui dépassent très largement la question du climat. On ne peut pas dire aux gens de ne pas avoir d’enfants comme on leur interdirait de circuler sur les voies sur berges. Éthiquement, ce n’est pas possible. C’est une restriction beaucoup plus grande de la liberté individuelle. »

Mais derrière cette « tentative maladroite » de prendre en compte l’argument démographique, François Gemenne souligne qu‘il ne doit pas éluder l’enjeu majeur du niveau de développement. Afin d’étayer ses dires, l’universitaire cite deux exemples : Pour une population équivalente, la Chine émet actuellement trois fois plus de gaz à effet de serre que l’Inde. Autre cas éloquent : l’Afrique, qui est le continent à la plus forte progression démographique, est aussi celui dont la progression des émissions de gaz progresse le moins.

« Quand une jeune fille termine le cycle secondaire, elle a généralement moins d’enfants au cours de sa vie active car son éducation lui laisse le choix »

Cyril Dion, écrivain et réalisateur

« Tous les ouvrages sérieux abordent la question de la démographie dans la lutte contre le réchauffement climatique » abonde l’écrivain et réalisateur Cyril Dion. « Comme l’explique Paul Hawken dans Drawdown, cela passe par l’éducation des filles. Quand une jeune fille termine le cycle secondaire, elle a généralement moins d’enfants au cours de sa vie active car son éducation lui laisse le choix. »

Mais Cyril Dion lui aussi estime que la démographie n’est pas la seule en cause. Le mode de vie entre en compte. « L’empreinte écologique d’un américain sera de l’ordre de sept planète, quand celle d’un Bangdaladais atteindra à peine 0,5 planète. » Le mode de vie occidental, véhiculé comme modèle à l’étranger, pose donc un problème majeur. « L’Occident a gagné la bataille du récit. Il a imposé son mode de vie qui est aujourd’hui visé par la Chine, l’Inde ou le Brésil. Aujourd’hui, il faut changer nos comportements et construire un autre récit, montrer que l’on s’est planté et que ce mode de vie nous conduit dans le mur », conclut-il.



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COP 24 : Ne pas faire d’enfant, une piste pour sauver la planète ?

PARENTALITE Alors que les inquiétudes pour l’avenir de la planète augmentent et qu’elles sont au cœur de cette COP 24, certains choisissent de renoncer à faire des enfants…

Oihana Gabriel

Publié le 04/12/18 à 08h05 — Mis à jour le 04/12/18 à 12h36

Faire ou ne pas faire d’enfant, telle est parfois la question ? Pour certains spécialistes, la question démographique est incontournable quand on parle de sauvegarde de la planète. Certains Français renoncent à avoir des enfants par militantisme écologique. Pourtant, pour certains experts, l’urgence n’est pas de faire aucun ou moins d’enfants, mais plutôt de changer radicalement notre façon de consommer.

« J’ai toujours eu envie d’avoir des enfants, explique Léa*, 37 ans. Mais au vu de l’absence de progrès concernant la situation climatique, j’ai pris la décision de pas en faire. » Un choix personnel et politique précipité par le rapport sur la planète-étuve en août sur l’état de la planète. « Cela m’a fait un choc, avoue la Parisienne. En France, on a encore accès à tout de façon extravagante, mais ça va changer. Ne pas faire d’enfant, c’est une façon de ne pas être dans l’illusion que tout va bien. » « Un enfant égale plus de pollution et plus de consommation »

Un choix intime que certains trouvent extrême, d’autres altruiste, mais qui n’est pas isolé. « Je ne suis pas militante, mais c’est ma façon de protester à ma micro-mesure, poursuit Léa. Ma famille prend ça comme une lubie. Et évidemment, ma mère veut être grand-mère. Mais depuis que j’en parle, je rencontre beaucoup de femmes qui partagent cette même préoccupation. Certaines organisent même un enterrement de vie de mère, sur le modèle de la baby shower ! » Selon elle, « tant qu’on ne change pas radicalement notre mode de vie, un enfant égale plus de pollution et plus de consommation ». Ceux qui ont testé les kilos de couches, de nourriture, de lessives, de jouets qui riment avec parentalité peuvent en témoigner…

Mais le choix de Léa a une autre explication : « je ne me vois pas porter la responsabilité de mettre au monde un enfant qui risque de voir la nature se déchaîner, de souffrir du manque d’eau, voir les maladies proliférer, les migrations climatiques dans un climat populiste. Le scénario catastrophe n’est plus du délire ou le fait de quelques illuminés. On en voit tous les jours les conséquences… »

« Cela traduit dans cette génération une préoccupation écologique beaucoup plus ancrée qu’avant, analyse Anne Gotman, sociologue au CNRS et auteure de Pas d’enfant. La volonté de ne pas engendrer**. J’ai réalisé cette enquête il y a deux ans, et les couples sans enfant étaient déjà convaincus des défis écologiques. Mais j’ai l’impression que cet été caniculaire, la démission de Hulot et le rapport des climatologues ont créé une peur palpable. Maintenant trouver les moyens de répondre à ces défis, c’est autre chose… »

Raisons conscientes et inconscientes

Difficile pour autant de savoir précisément pour quelles raisons, conscientes ou inconscientes, on choisit de fonder ou non une famille… « C’est possible que certaines personnes pensent à la planète quand elles prennent la décision de renoncer à avoir des enfants, souligne Hervé Le Bras, démographe et directeur d’études à l’Ecole des Hautes études en sciences sociales (EHESS). Mais il est rare que des considérations aussi générales aient un effet important sur la fécondité. A la fin du XIXe siècle, on encourageait les Français à avoir des enfants par patriotisme. Cela n’a rien donné. Même en Allemagne, où l’écologie est plus développée, la baisse de la fécondité est davantage liée à la difficulté de concilier vie professionnelle et maternité qu’aux inquiétudes pour l’avenir de la planète. » Dubitative également, la sociologue Anne Gotman estime que « certes, l’empreinte carbone d’un enfant est effroyable. Mais cette justification écologique vient couroner un ensemble de raisons personnelles et sociétales. » La démographie, une question de taille

Il n’empêche. La question démographique devient incontournable quand on parle avenir de la planète. Selon l’ONU, nous devrions atteindre 8,6 milliards d’être humains en 2030, 9,8 en 2050 et 11,2 en 2100. Il y a un mois, une infographie réalisée par l’AFP avait fait jaser sur les réseaux car on y voyait clairement que la meilleure décision à prendre pour réduire son empreinte carbone restait de… « faire un enfant de moins ». Un calcul issu d’une étude suédoise de 2017. Si certains sur la Toile se sont offusqués, certaines voix s’élèvent pour insister sur la surpopulation. « La démographie est le risque numéro 1 : chaque habitant consomme des ressources et émet une quantité de CO2, martèle Marie-Lise Chanin, chercheuse de l’Académie des Sciences, qui a signé la tribune du Monde « Climat : Freiner la croissance de la population est une nécessité absolue ». En ce moment, on consomme plus de ressources que la nature peut renouveler en un an à partir du 1er août. Alors imaginez quand on sera 11 milliards ! »

Faire moins d’enfants… et consommer moins

Ne pas faire d’enfant pour protéger la planète, un choix judicieux ? Pas pour Hervé Le Bras. « Je pense que cette étude suédoise fait abstraction de l’aspect économique des choses. Dans beaucoup de pays qui se sont développé, la fécondité a été remplacée par la consommation ! Prenons le Brésil : on est passé de 6 enfants par femme en 1970 à 1,8 aujourd’hui. En même temps, le PIB a été multiplié par 4 ou 5. Même chose pour la Chine, devenu le 2e producteur de CO2. D’autant que les études montrent que quand on fait moins d’enfants, on a plus de moyens de consommer : de voyager, d’avoir une grosse voiture… »

Autre argument avancé par le démographe : « Si on veut gagner la cause écolo, il vaut mieux faire des enfants écolos que pas du tout ! » Un raisonnement que contredit Léa. Dans les pays développés comme ceux en voie de développement, ce changement radical de société ne pourra avoir lieu si la surpopulation poursuit sa course effrénée. « Si nos enfants ont du mal à trouver de l’eau, si les choses élémentaires manquent, ils seront en mode survie et ne pourront pas faire évoluer les choses dans le bon sens pour protéger la planète », avance la trentenaire.

Elle ne nie pas que ce choix intime soit problématique : « Quand on cesse de faire des enfants, la société meurt. Et je sais que ce n’est pas à mon échelle que je vais moins polluer, mais c’est tout un ensemble. Il y a une réflexion à mener au niveau mondial. En Europe, le taux de natalité est faible. » Et le démographe de renchérir : « les deux régions du monde où la fécondité est importante sont la zone intertropicale de l’Afrique et l’Asie de l’Ouest. Je trouve que c’est plutôt à ce niveau-là internationalement que l’on doit s’organiser pour lutter contre cette extraordinaire fécondité. »

« Mais il reste très délicat d’expliquer qu’il faudrait limiter la fécondité africaine, avoue Marie-Lise Chanin. La meilleure méthode, c’est de faire l’éducation des femmes en Afrique, de leur donner accès à la contraception et de mettre en place une retraite et une couverture santé. Pour le moment, leurs enfants, c’est leur richesse. » Une prise de conscience qui semble pourtant faire son chemin. « La surpopulation a toujours posé problème, mais on commence à pouvoir le dire maintenant », avoue Anne Gotman.

« Il faut que les efforts soient conjoints, complète Léa. Faire moins d’enfants mais aussi les éduquer différemment pour limiter la consommation de viandes, de plastique, la pollution, la déforestation et ainsi leur assurer un avenir meilleur. »

* Le prénom a été changé.

** Pas d’enfant. La volonté de ne pas engendrer, Anne Gotman, 2017, Éditions de la Maison des sciences de l’homme.